Introduction au “Municipalisme libertaire”

Pour impul­ser un chan­ge­ment de socié­té éco­lo­gique et social, il faut le faire « de l’extérieur »: c’est ce qu’affirme Mur­ray Book­chin, théo­ri­cien du muni­ci­pa­lisme libertaire.

L’objectif de cette théo­rie est la créa­tion d’un espace alter­na­tif « à côté » de l’Etat ou à l’extérieur de sa sphère d’influence. Une des stra­té­gies pos­sibles consiste à éta­blir le muni­ci­pa­lisme en par­ti­ci­pant aux élec­tions muni­ci­pales par exemple.

Plu­tôt que de pro­vo­quer une réac­tion pro­tec­trice ou réac­tion­naire chez les habitant·e·s en pre­nant la com­mune par les armes, les militant·e·s muni­ci­pa­listes doivent convaincre et moti­ver les citoyen·ne·s à pra­ti­quer les prin­cipes de la démo­cra­tie directe à tra­vers des conseils ou des assem­blées : les encou­ra­ger à reprendre en main leur commune.

Pour­quoi par­ler d’espace « à côté » ? C’est sim­ple­ment que l’appareil muni­ci­pal exis­tant (sous tutelle de l’État) n’est qu’un outil par­mi tant d’autres : après les élec­tions rem­por­tées par les municipalistes/citoyen·ne·s engagé·e·s, les conseils « citoyens » créés a prio­ri en dehors des mai­ries voient leurs déci­sions appli­cables sans pro­blèmes ni sanc­tions. L’État ne peut remettre en ques­tion ces élec­tions sans remettre en cause ses propres pra­tiques démo­cra­tiques et les citoyen·ne·s se voient engagé·e·s par leur vote et leur par­ti­ci­pa­tion aux conseils dans ce pro­jet social et écologique.

L’ob­jec­tif de cette théo­rie est la créa­tion d’un espace alter­na­tif “à côté” de l’Etat

Les chan­ge­ments éco­no­miques et sociaux impul­sés direc­te­ment par les besoins des citoyen·ne·s de ladite com­mune seront de plus en plus accep­tés, et la com­mune sera de plus en plus liber­taire et vivante.

Là encore comme le Dual Power – mais en pro­cé­dant dif­fé­rem­ment – la muni­ci­pa­li­té liber­taire vise à confron­ter l’État, et per­met énor­mé­ment de pos­si­bi­li­tés sur la consti­tu­tion d’instances alter­na­tives. Mais il faut gar­der à l’esprit que l’État, mena­cé par ces ini­tia­tives, ten­te­ra à chaque oppor­tu­ni­té qui lui sera offerte (crise locale, crime, des­truc­tion de biens pri­vés etc.) de les réduire à néant. Ici encore le muni­ci­pa­lisme appor­te­ra quelques solutions.
Cet article est divi­sé en trois par­ties : poli­tique, éco­no­mique et pra­tique du muni­ci­pa­lisme libertaire.

La poli­tique municipaliste

Au niveau de la ges­tion poli­tique, le muni­ci­pa­lisme liber­taire explore le pas­sé pour construire l’avenir. Pour Mur­ray Book­chin le mot poli­tique moderne, tour­né vers la déma­go­gie, la ges­tion de l’État, du gou­ver­ne­ment a per­du son sens pre­mier : la ges­tion des affaires publiques par la popu­la­tion au niveau com­mu­nau­taire. Janet Biehl, sa com­pagne, défi­nit le muni­ci­pa­lisme liber­taire comme étant « la ges­tion directe des affaires com­mu­nau­taires par les citoyens en per­sonne au sein d’institutions participatives ».

Héri­tier de la com­mune de paris, de Krons­tadt, de la cité athé­nienne, des théo­ries de Kro­pot­kine et de Bakou­nine, le muni­ci­pa­lisme « veut res­sus­ci­ter la poli­tique dans le sens ancien du terme : construire et étendre la démo­cra­tie directe locale de sorte que les simples citoyens prennent des déci­sions rela­tives à leur com­mu­nau­té et à la socié­té dans son ensemble » (Biehl).

Pour atteindre un tel objec­tif, Book­chin décrit la com­mune (ou muni­ci­pa­li­té) comme cel­lule vivante, base de la par­ti­ci­pa­tion à la vie poli­tique et éco­no­mique locale. La démo­cra­tie « directe » y est plus simple à éta­blir et à mettre en pra­tique. Les comi­tés sont consti­tués de sorte à impul­ser la soli­da­ri­té et la coopé­ra­tion interne – à la com­mune – et externe – via un réseau confédéral.

Le muni­ci­pa­lisme ne consi­dère pas les réfé­ren­dums légi­times à légi­fé­rer ain­si que le par­le­ment, le gou­ver­ne­ment, et les autres struc­tures natio­nales (cen­tra­li­sées et imper­son­nelles) qui ne per­mettent aucuns chan­ge­ments réels : ces ins­tances voient les individu·e·s comme des électeur·rice·s dépourvu·e·s de « savoir-faire » poli­tique et non pas comme des citoyen·ne·s éduqué·e·s et averti·e·s. (1)

Le muni­ci­pa­lisme met en avant la conscience morale, sociale et poli­tique des Hommes. « De nos jours, bien peu de par­le­men­taires seraient capables de tra­cer les plans d’une cen­trale nucléaire ou d’en expli­quer le fonc­tion­ne­ment mais cela ne les empêche pas de prendre des déci­sions poli­tiques au sujet de l’énergie nucléaire. Dans une socié­té muni­ci­pa­liste liber­taire, les connais­sances néces­saires seront dis­sé­mi­nées autant que pos­sible par­mi les citoyens. Les ques­tions tech­niques devront être pré­sen­tées avec clar­té et dans un lan­gage simple de sorte que les citoyens ayant une com­pé­tence rai­son­nable puissent prendre les déci­sions poli­tiques les concer­nant. » (2)

Les citoyen·ne·s constitué·e·s en conseils régulent, orientent et dirigent la poli­tique de la com­mune dans son ensemble : la muni­ci­pa­li­té n’est plus diri­gée par des « maires » mais par des délégué·e·s « représentatif·ve·s » asservi·e·s aux conseils citoyens. La mai­rie est volon­tai­re­ment impli­quée car elle est occu­pée par des citoyen·n·e·s élu·e·s à tra­vers des élec­tions muni­ci­pales clas­siques. De la même manière, des délégué·e·s à man­dat révo­cables seront élu·e·s dans ces conseils et trans­met­tront les besoins, reven­di­ca­tions, posi­tions, offres ou prises de déci­sions de celles et ceux-ci aux ins­tances confé­dé­rales (échelle plus vaste).

Concer­nant la prise de déci­sion locale, on suit le sché­ma sui­vant : pour X déci­sions, les citoyen·ne·s – réuni·e·s en conseils – prennent des déci­sions poli­tique et élisent des représentant·e·s administratif·ve·s qui par la suite les rap­portent à Y « expert·e·s » professionnel·le·s (pro­ve­nant de de coopé­ra­tives, d’entreprises, de divers petits com­merces et impliqué·e·s dans le pro­jet). Les Y réparti·e·s (poten­tiel­le­ment à tra­vers d’autres conseils), après s’être acquitté·e·s ou non des tâches, rap­portent leurs résul­tats aux conseils citoyens rela­tifs aux X déci­sions. Dans l’idéal, il existe un conseil pour chaque secteur.

On suit donc un sché­ma cyclique où la base des déci­sions est le·a citoyen·ne dans cet ordre : citoyen·ne·s > poli­tique > admi­nis­tra­tion > expert·e·s > citoyen·ne·s et ain­si de suite. On évite ain­si la stag­na­tion d’élites, d’expert·e·s et la bureau­cra­ti­sa­tion. C’est le sché­ma inverse à celui des démo­cra­ties repré­sen­ta­tives où la masse est pen­sée comme inca­pable de se gou­ver­ner. Ici la masse désigne les expert·e·s mais ce sont les conseils qui forment la prin­ci­pale source déci­sion­nelle locale.

Les déci­sions y seraient prises par la majo­ri­té. Elle per­met, selon M. Book­chin, l’exposition d’arguments plus réflé­chis où les ques­tions seraient dis­cu­tées puis redis­cu­tées. Le consen­sus ne per­met­tant que peu d’opposition selon lui. Cette idée n’est pas reprise for­ce­ment en pra­tique, ce choix dépend en fait du milieu, des cultures et des situa­tions dans lequel se trouve le conseil.

Book­chin reprend l’un des pré­ceptes des liber­taires : tout être humain a les com­pé­tences de gérer les affaires de la com­mu­nau­té dont il est membre. Et que toute poli­tique n’ayant pas été pro­po­sée, dis­cu­tée puis déci­dée par le peuple n’a pas de légi­ti­mi­té démo­cra­tique. (3)

« Il connaît plus ou moins les affaires de sa com­mune, il s’y inté­resse beau­coup, et il sait choi­sir dans son sein les hommes les plus capables de les biens conduire. Dans ces affaires, le contrôle lui-même est pos­sible, puisqu’elles se font sous les yeux des élec­teurs, et touchent aux inté­rêts les plus intimes de leur exis­tence quo­ti­dienne. C’est pour­quoi les élec­tions com­mu­nales sont […] les plus réel­le­ment conformes aux sen­ti­ments, aux inté­rêts, à la volon­té popu­laires. » – Bakou­nine. (4)

Plus loin encore, le muni­ci­pa­lisme liber­taire consi­dère qu’en cas de confron­ta­tion mili­taire avec un·e adver­saire, les milices popu­laires à l’image des zapa­tistes, des colonnes de la CNT de 1936, de l’armée noire de Makh­no ou encore des citoyen·ne·s‑soldat·e·s d’Athènes, per­mettent un bas­cu­le­ment de force impor­tant – utile lorsque l’on confronte un·e ennemi·e plus grand·e (5) – basé sur le com­bat urbain et rural stra­té­gique, réflé­chi, rapide, indé­pen­dant et adaptable.

Sans uni­formes mais bien formé·e au com­bat, le·a citoyen·ne-soldat·e se bat volon­tai­re­ment pour pro­té­ger sa liber­té, les conseils, ses pro­jets, ses cama­rades, ses ami·e·s, et cela en connais­sant le ter­rain, en s’y étant entraîné·e paral­lè­le­ment à ses acti­vi­tés : embus­cades, sabo­tages et impro­vi­sa­tions per­mettent de mettre en déroute un·e ennemi·e puissant·e et lent·e dont les struc­tures hié­rar­chiques empêchent l’originalité stra­té­gique. De son côté la milice apprend des stra­té­gies mili­taires de son ennemi·e et peut ain­si pré­voir une défense.

Bien sûr cette milice est popu­laire donc volon­taire. Cette stra­té­gie ne sou­haite pas for­mer une grande armée asser­vie mais bien une assem­blée de citoyen·ne·s convaincu·e·s, uni·e·s, soli­daires et conscient·e·s de leurs actes. Ces milices n’exclues pas l’existence de com­man­de­ment comme l’anarchisme n’exclut pas la pré­sence d’expert·e·s, de for­ma­teurs et for­ma­trices, de professionnel·le·s etc. Ces « chef·fe·s » mili­taires sont élu·e·s par les citoyen·ne·s‑soldat·e·s par le biais de conseils, assu­rant ain­si la légi­ti­mi­té de ce·tte chef·fe à mener un combat.

A pro­pos de l’autodéfense, John Clark dans « Intro­duc­tion à la phi­lo­so­phie éco­lo­gique et poli­tique de l’anarchisme » écrit : « C’est un prin­cipe fon­da­men­tal de l’anarchisme que la défense de la com­mu­nau­té doit résul­ter de l’action volon­taire des gens. […] Les anar­chistes pensent fer­me­ment que « la guerre est la san­té de l’Etat » et que, par consé­quent, elle risque tou­jours de por­ter atteinte à la liber­té sinon de lui être fatale. Mili­ta­ri­ser une socié­té pour com­battre l’autoritarisme c’est, du coup, faire triom­pher l’autoritarisme. […] Une com­mu­nau­té unie (par exemple, une socié­té tri­bale) n’a pas de dif­fi­cul­té à assu­rer une par­ti­ci­pa­tion à sa défense, bien que l’exigence anar­chiste du volon­ta­riat devienne de plus en plus dif­fi­cile à rem­plir au fur et à mesure que s’accroît la menace pour le groupe. […]

Par exemple, le mou­ve­ment pay­san anar­chiste makh­no­viste en Ukraine a déve­lop­pé des méthodes très effi­caces de gué­rilla contre des adver­saires de force supé­rieure et dans des com­bats qui durèrent entre 1918 et 1921. Le suc­cès mili­taires des makh­no­vistes prirent fin seule­ment lorsque leur armée, alors déci­mée après des vic­toires rem­por­tées contre les forces de droite, fut atta­quée par leur « allié », les bol­ché­viques. […] (En par­lant des com­mu­nau­tés espa­gnoles) En fait, le sou­tien et le moral décli­nèrent de façon signi­fi­ca­tive uni­que­ment quand les milices furent mili­ta­ri­sées par les soins de l’Etat. »

Book­chin insiste aus­si sur le carac­tère ouvert de ce modèle démo­cra­tique : ce n’est pas le·a pro­lé­taire qui y est adulé·e mais le·a citoyen·ne et la lutte des classes est mise de côté au pro­fit d’une démo­cra­tie locale visant l’évolution crois­sante des consciences et idées libertaires :

« Les anar­chistes com­mu­nau­taires ne concentrent pas toute leur atten­tion sur le lieu de tra­vail ni même sur l’économie (aus­si impor­tantes qu’ils puissent être) mais plu­tôt sur une com­mu­nau­té totale, avec tous ses élé­ments entre­la­cés, comme le tra­vail, le jeu, l’éducation, la com­mu­ni­ca­tion, le trans­port, l’écologie, et ain­si de suite. Ils affirment qu’isoler les pro­blèmes de pro­duc­tion de leur contexte social peut mener tout droit à l’éternelle erreur mar­xiste qui consiste à com­battre l’exploitation éco­no­mique tout en per­pé­tuant et, peut-être même, en déve­lop­pant d’autres formes de domi­na­tion. […] [à pro­pos de la lutte des classes] Cette foi per­siste encore. 

[…] Le culte de la classe ouvrière du salut par le tra­vail paraît de moins en moins attrayant dans une socié­té où le tra­vail devient de plus en plus frag­men­té et abs­trait, dans laquelle l’appartenance de classe se défi­nit moins clai­re­ment et devient moins essen­tielle pour la recon­nais­sance sociale, et où la consom­ma­tion pri­vée devient l’ultime refuge de l’individu déso­cia­li­sé. » (6)

Le muni­ci­pa­lisme irait dans le sens de « la vie dans son ensemble » ne pre­nant pas le « tra­vail » comme base idéo­lo­gique. Le citoyen·ne, la nature et la vie font objets de point de départ à cette idéo­lo­gie tan­dis que les rap­ports de classes et l’économie sont déve­lop­pés a pos­te­rio­ri. L’une des stra­té­gies essen­tielle du muni­ci­pa­lisme liber­taire est l’éducation popu­laire et évo­lu­tive. On peut citer quelques exemples : l’accès aux conseils poli­tiques est éta­bli à 15 ans, l’implication à la vie de la com­mune et le temps qui y est consa­cré motive la réflexion poli­tique et éman­ci­pa­trice, on se détache de la nation pour se rap­pro­cher du local à tra­vers des conseils et des assemblées.

Plus il ou elle pra­tique les idées démo­cra­tiques, plus le ou la citoyen·ne se rap­proche de sa com­mune (et de ses concitoyen·ne·s) et agi­ra en son sens, le plus iel y par­ti­ci­pe­ra — en sa volon­té et sa dura­bi­li­té — le plus iel s’émancipera de son travail.

On note aus­si son oppo­si­tion à l’anarchisme indi­vi­dua­liste dans la revue cana­dienne « Rela­tions », Claude Rioux explique les craintes de Book­chin : « L’anarchisme peut être « conta­mi­né » par le contexte et l’environnement bour­geois qu’il com­bat. Les tra­vers de l’introspection et du nar­cis­sisme de la géné­ra­tion des baby-boo­mers ali­mentent l’émergence d’un anar­chisme plus proche de la psy­cho­thé­ra­pie que de la révo­lu­tion : un aven­tu­risme incons­cient fait d’aversion pour la théo­rie, une célé­bra­tion de l’incohérence théo­rique sous cou­vert de plu­ra­lisme, un enga­ge­ment apo­li­tique et anti-orga­ni­sa­tion­nel dans une recherche de la joie de vivre inten­sé­ment orien­tée vers soi-même. […] Cette subor­di­na­tion du col­lec­tif à l’ego et de la socié­té à l’individu, nous dit Book­chin, est cou­rante dans l’anarchisme comme mode de vie, qui tend à la pri­va­ti­sa­tion des angoisses com­munes et à la sanc­ti­fi­ca­tion du soi comme refuge au malaise social. »

Rioux ajoute que cette vision a des consé­quences sur le mou­ve­ment liber­taire, notam­ment une exal­ta­tion du consen­sus (la majo­ri­té est illé­gi­time même contre l’opinion d’un·e seul·e individu·e) et de la spon­ta­néi­té indi­vi­duelle aux dépens de l’organisation démo­cra­tique, plus à même d’établir des ins­ti­tu­tions auto­gé­rées ayant du pou­voir contre la domi­na­tion capi­ta­liste et les ins­ti­tu­tions hié­rar­chi­sées. » (7)

« En 1984, il est invi­té à la ren­contre inter­na­tio­nale «Ciao anar­chi­ci», à Venise. Janet Biehl, qui a été sa com­pagne pen­dant vingt ans et lui a consa­cré une bio­gra­phie, raconte com­ment il est mon­té à la tri­bune habillé d’un uni­forme de tra­vail vert, une ran­gée de crayons de méca­ni­cien dans sa poche de che­mise : «Il leur a dit : “Les mou­ve­ments fémi­nistes, éco­lo­gistes et com­mu­na­listes doivent créer des com­mu­nau­tés humaines décen­tra­li­sées adap­tées à leurs éco­sys­tèmes. Ils doivent démo­cra­ti­ser les vil­lages et les villes, les confé­dé­rer, et créer un contre-pou­voir face à l’État.”»

La ren­contre se révèle catas­tro­phique. On lui objecte que les gou­ver­ne­ments muni­ci­paux ne sont que des États-nations en minia­ture ; les conseils de citoyen·ne·s, de petits Par­le­ments. Les participant·e·s rejettent le prin­cipe du vote à la majo­ri­té, asso­cié à une tyran­nie du plus grand nombre. Book­chin en conclut que l’anarchisme est incom­pa­tible avec le socia­lisme. En plai­dant pour la sou­ve­rai­ne­té de la per­sonne, et non du peuple, les anar­chistes de son époque se com­plaisent à ses yeux dans une simple radi­ca­li­té «de style de vie». Il décide de se reti­rer de la poli­tique. » (8)

Éco­no­mie muni­ci­pa­liste, une socié­té Post-rareté

Même si Book­chin affirme son scep­ti­cisme vis-à-vis de l’efficacité poli­tique de la coopé­ra­tive — dans éco­no­mie de mar­ché ou éco­no­mie de morale : « Aucune ferme bio­lo­gique ne peut concur­ren­cer vic­to­rieu­se­ment l’agrobusiness, et aucune coopé­ra­tion ali­men­taire ne peut l’emporter sur un mar­ché par ses prix ou son offre de pro­duits » — elle n’est pas incom­pa­tible avec le municipalisme.

Pour lui, le pro­fit, le ren­de­ment et la concur­rence finissent tou­jours par s’imposer dans n’importe quelle coopé­ra­tive. Les entre­prises alter­na­tives se trans­forment inévi­ta­ble­ment en entre­prises comme les autres. L’objet pro­duit par la coopé­ra­tive reste autant une mar­chan­dise imper­son­nelle que celle pro­duite par une grande entre­prise. Par la coopé­ra­tive l’existence de la mar­chan­dise, et donc du capi­ta­lisme, n’est pas remise en question.

La coopé­ra­tive n’a de sens qu’une fois le capi­ta­lisme abo­lit : elle reste œuvre vaine sinon. (9)

Les entre­prises pri­vées, publiques ou coopé­ra­tives seraient en quelque sorte « muni­ci­pa­li­sées » par la col­lec­ti­vi­té : les action­naires sont jeté·e·s et les tra­vailleu­reuses, confondu·e·s avec les conseils citoyens, décident de la marche à suivre.

Il faut que la coopé­ra­tive de pro­duc­tion, d’habitation, agri­cole… se ral­lie volon­tai­re­ment à la muni­ci­pa­li­té et ses conseils, elles deviennent des ins­ti­tu­tions participatives :

« Contre les coopé­ra­tives et la pro­prié­té publique, l’auteure [Janet Biehl] pré­co­nise la muni­ci­pa­li­sa­tion de l’économie qui « signi­fie la « pro­prié­té » et la ges­tion de l’économie par les citoyens de la com­mu­nau­té. » Dans ce sys­tème, « la richesse, la pro­prié­té et les moyens de pro­duc­tion seraient remis à la muni­ci­pa­li­té. » […] De prime abord, cela ne pose aucun pro­blème aux par­ti­sans du muni­ci­pa­lisme liber­taire puisque la démo­cra­tie ne serait qu’une ques­tion d’échelle : « L’assemblée déci­de­rait non seule­ment de la pro­duc­tion, mais éga­le­ment de la dis­tri­bu­tion des moyens d’existence maté­riels, rem­plis­sant ain­si la pro­messe de l’après-rareté. » Plu­sieurs objec­tions peuvent être faites à ce postulat. […]

La muni­ci­pa­li­té deve­nant pro­prié­taire des moyens de pro­duc­tion, les citoyen-nes de celle-ci sont donc cen­sé-es déter­mi­ner les condi­tions de la pro­duc­tion, ce qui fait dire à Janet Biehl que « ceux qui tra­vaillent dans une usine par­ti­ci­pe­raient à l’élaboration des poli­tiques non seule­ment pour cette usine, mais pour toutes les autres, aus­si bien que pour les fermes ; non pas à titre d’ouvriers, de fer­miers, de tech­ni­ciens, d’ingénieurs ou de pro­fes­sion­nels, mais en qua­li­té de citoyens. » 

[…] La relo­ca­li­sa­tion de l’économie est un objec­tif indis­pen­sable de toute poli­tique éco­lo­gique visant à limi­ter les émis­sions exces­sives de gaz à effet de serre qui mettent en dan­ger l’existence même de la vie humaine sur cette pla­nète. Il n’en reste pas moins que pour cer­taines pro­duc­tions, les éco­no­mies d’échelle sont aus­si une source d’économies éner­gé­tiques qui peuvent avoir un effet éco­lo­gique posi­tif, ce qui n’a pas échap­pé à Janet Biehl : « À l’échelon confé­dé­ral, les diverses muni­ci­pa­li­tés par­ta­ge­raient les res­sources et pren­draient des déci­sions concer­nant la pro­duc­tion et la distribution. […] 

« Si une muni­ci­pa­li­té essayait de s’enrichir au détri­ment des autres, ses par­te­naires confé­dé­rées auraient le droit de l’en empê­cher. Une poli­ti­sa­tion com­plète de l’économie pren­drait place, éten­dant l’économie morale à une échelle plus large. » (10)

Le muni­ci­pa­lisme s’oppose à la natio­na­li­sa­tion ou appro­pria­tion des moyens de pro­duc­tion par l’État qui abou­ti­rait à une nou­velle forme de pro­prié­té pri­vée en pro­prié­té éta­tique : Cela vien­drait chan­ger la forme du pou­voir sans l’abolir. Il s’oppose logi­que­ment à la pro­prié­té pri­vée pour son carac­tère aléa­toire, indi­vi­duel, concur­ren­tiel etc. (voir cri­tique du capitalisme).

« Toute uni­té éco­no­mique de pro­prié­té pri­vée, qu’elle soit gérée col­lec­ti­ve­ment ou par des direc­teurs, pro­prié­té de tra­vailleurs ou d’actionnaires, est non seule­ment sujette à être assi­mi­lée par le sys­tème capi­ta­liste, mais condam­née à l’être un jour, que cela plaise ou non à ses membres. tant et aus­si long­temps que dure­ra le capi­ta­lisme, la concur­rence exi­ge­ra tou­jours des entre­prises com­prises en son sein qu’elles recherchent les coûts les plus bas (y com­pris celui de la main‑d’œuvre), des mar­chés plus grands et des avan­tages sur leurs rivales, pour maxi­mi­ser les pro­fits. Elles auront tou­jours ten­dance à appré­cier les êtres humains selon leur niveau de pro­duc­ti­vi­té et de consom­ma­tion de pré­fé­rence à tout autre cri­tère. » Biehl (11)

Il faut donc, pour abo­lir l’État et le capi­ta­lisme, éta­blir une muni­ci­pa­li­sa­tion de l’économie : chaque muni­ci­pa­li­té s’approprie les moyens de pro­duc­tion et ceux-ci doivent être contrô­lés et gérés par les citoyen·e·s dans l’intérêt de toute la com­mu­nau­té et de ses besoins. Ce qui résou­drait le pro­blème de la mar­chan­dise et de sa nature.

« C’est l’un des rares textes (From Urba­ni­za­tion to Cities) consa­crés par Book­chin à l’économie. Pour l’essentiel, il consti­tue une cri­tique radi­cale de l’ « éco­no­mie de mar­ché », mais – et c’est là son ori­gi­na­li­té et, peut-on pen­ser, son inté­rêt – ce n’est en rien une cri­tique d’économiste, qui met­trait en évi­dence les dys­fonc­tion­ne­ments, les absur­di­tés ou l’inéluctabilité de la crise de cette économie. […]

Presque toutes les muni­ci­pa­li­tés avaient dans le pas­sé été frag­men­tées par des dif­fé­rences de sta­tut éco­no­mique, avec des classes pauvres, moyennes et riches dres­sées les unes contre les autres jusqu’au point de rui­ner les liber­tés muni­ci­pales, comme le montre clai­re­ment l’histoire san­glante des com­munes du Moyen-âge et de la Renais­sance en Italie. […] 

À une échelle sans pré­cé­dent dans l’histoire amé­ri­caine, une énorme varié­té de groupes de citoyens ont ras­sem­blé des gens de toute ori­gine de classe dans des pro­jets com­muns autour de pro­blèmes sou­vent à carac­tère local mais qui concernent la des­ti­née et le bien-être de l’ensemble de la communauté. […] 

La pro­prié­té pri­vée, au sens tra­di­tion­nel du terme, qui per­pé­tuait le citoyen en tant qu’individu éco­no­mi­que­ment auto­suf­fi­sant et poli­ti­que­ment indé­pen­dant est en train de dis­pa­raître. Elle ne dis­pa­raît pas parce que le « socia­lisme ram­pant » a dévo­ré la « libre entre­prise » mais bien parce que la « grande firme ram­pante » a tout dévo­ré – iro­ni­que­ment au nom de la « libre entre­prise ». L’idéal grec d’un citoyen poli­ti­que­ment sou­ve­rain qui pou­vait juger ration­nel­le­ment des affaires publiques parce qu’il était libé­ré du besoin maté­riel et du clien­té­lisme n’est plus qu’une moquerie. […]

Le muni­ci­pa­lisme liber­taire pro­pose de redé­fi­nir la poli­tique pour y inclure une démo­cra­tie com­mu­nale directe qui s’étendra gra­duel­le­ment sous des formes confé­dé­rales, en pré­voyant éga­le­ment une approche dif­fé­rente de l’économie. Le muni­ci­pa­lisme liber­taire pro­pose que la terre et les entre­prises soient mises de façon crois­sante à la dis­po­si­tion de la com­mu­nau­té, ou, plus pré­ci­sé­ment, à la dis­po­si­tion des citoyens dans leurs libres assem­blées et de leurs dépu­tés dans les conseils confédéraux. […]

La maxime de cha­cun selon ses capa­ci­tés, à cha­cun selon ses besoins, cette exi­gence célèbre des dif­fé­rents socia­lismes du XIXe siècle, se trou­ve­rait ins­ti­tu­tion­na­li­sée comme une dimen­sion de la sphère publique. […]

Aucune com­mu­nau­té ne peut espé­rer acqué­rir une autar­cie éco­no­mique, ni ne devrait essayer de le faire. Éco­no­mi­que­ment, la large gamme de res­sources néces­saires à la pro­duc­tion de nos biens d’usage cou­rant exclut l’insularité refer­mée sur elle-même et l’esprit de clo­cher. Loin d’être une contrainte, l’interdépendance entre com­mu­nau­tés et régions doit être consi­dé­rée – cultu­rel­le­ment et poli­ti­que­ment – comme un avantage. 

L’interdépendance entre les com­mu­nau­tés n’est pas moins impor­tante que l’interdépendance entre les indi­vi­dus. Si elle est pri­vée de l’enrichissement cultu­rel mutuel qui a sou­vent été le pro­duit de l’échange éco­no­mique, la muni­ci­pa­li­té tend à se refer­mer sur elle-même et s’engloutit dans une forme de pri­va­tisme civique. Des besoins et des res­sources par­ta­gés impliquent l’existence d’un par­tage et, avec le par­tage, d’une com­mu­ni­ca­tion, d’un rajeu­nis­se­ment grâce à des idées nou­velles et d’un hori­zon social élar­gi qui faci­lite une sen­si­bi­li­té accrue aux expé­riences nou­velles. » — Jean Vogel (12)

Il faut donc, pour abo­lir l’E­tat et le capi­ta­lisme, éta­blir une muni­ci­pa­li­sa­tion de l’économie

L’automatisation et les machines peuvent créer une socié­té d’abondance au sein de laquelle tous les tra­vaux pénible pour­raient être effec­tués par des machines.

« Selon Colin Ward, l’expérience a révé­lé que les pro­po­si­tions de tra­vail inten­sif, de pro­duc­tion vivrière décen­tra­li­sée, faites par Kro­pot­kine il y a un siècle, sont tout à fait pra­ti­cables. Comme il l’a remar­qué, l’expérience japo­naise (évo­lu­tion de l’insuffisance du tra­vail domes­tique vers l’auto-suffisance jusqu’à une sur­pro­duc­tion exces­sive) illustre la vrai­sem­blance tech­nique des pro­po­si­tions de Kro­pot­kine quant à la pro­duc­ti­vi­té plus que suf­fi­sante de l’agriculture inten­sive. […] Le groupe de tech­no­lo­gie inter­mé­diaire de E.F. Schu­ma­cher a per­pé­tué la tra­di­tion de pen­seurs comme Kro­pot­kine et Williams Mor­ris en déve­lop­pant des tech­no­lo­gies dites appro­priées qui per­met­tront aux socié­tés en déve­lop­pe­ment de résoudre leurs pro­blèmes de rare­té et de chô­mage, tout en évi­tant les consé­quences désas­treuses de l’urbanisation et une lourde industrialisation.

Ce sera l’abondance des tech­no­lo­gies et du temps libre déga­gé par celle-ci : « la tech­no­lo­gie insé­rée dans le capi­ta­lisme ne peut être qu’aliénante et des­truc­trice tan­dis que dans une pers­pec­tive liber­taire elle peut être véri­ta­ble­ment libé­ra­trice tout en étant anti-pro­duc­ti­viste et éco­lo­gique de cette manière le temps libre en tant que pri­vi­lège social peut être abo­lie. » (13)

Ce temps libre per­met aux individu·e·s d’exercer et d’affûter leur capa­ci­té poli­tique, d’établir une édu­ca­tion popu­laire et de mettre en place les stra­té­gies du muni­ci­pa­lisme liber­taire étu­diées dans la par­tie précédente.

Pra­tique du muni­ci­pa­lisme liber­taire : éco­lo­gie sociale

Pour ce qui est de la pra­tique du muni­ci­pa­lisme / com­mu­na­lisme nous ne man­quons pas d’exemples his­to­riques : la com­mune de Paris, celles de Krons­tadt, celles de la CNT espa­gnoles, celles des Zapa­tistes etc.

Aujourd’hui il existe des pos­si­bi­li­tés muni­ci­pa­listes liber­taires dans cer­taines com­munes fran­çaises, ancrées depuis tou­jours dans les tra­di­tions de la gauche radi­cale. Comme cela fut le cas à Van­don­court en 1971 :

« En moins de temps qu’il n’en faut pour le dire, dans un vil­lage asep­ti­sé par manque de pro­jets, un son­dage est orga­ni­sé, un pro­gramme éla­bo­ré, une liste dépo­sée, un slo­gan dif­fu­sé : on est plus intel­li­gents à plu­sieurs que seul ! La liste l’emporte. […] Une fois en place, la nou­velle équipe met en pra­tique les prin­cipes qui l’ont fait élire : infor­ma­tion libre et trans­pa­rente, aucun sujet tabou, com­mis­sions extra-muni­ci­pales en place sur divers sujets (enfance, bâti­ments, bud­get…) ouvertes à tous, réunions publiques men­suelles infor­mant ceux qui ne peuvent se rendre aux réunions pré­pa­ra­toires, conseil des jeunes, des anciens, des asso­cia­tions ! […] Démo­cra­tie directe va de pair avec auto­ges­tion et contrôle popu­laire… » (14)

En 1971 le vil­lage est pas­sé en démo­cra­tie par­ti­ci­pa­tive. Le fonc­tion­ne­ment est de type auto­ges­tion. La vie démo­cra­tique s’or­ga­nise grâce à :
• un conseil de treize membres élus ;
• un conseil des jeunes ;
• un conseil des anciens ;
• un conseil des associations.

Les conseils se réunissent, au moins chaque mois, ce sont là soixante citoyens ras­sem­blés. Sept com­mis­sions sont mises en place (sco­laire, bud­get, tech­nique, déve­lop­pe­ment éco­no­mique, sociale, fêtes et céré­mo­nies, envi­ron­ne­ment). Ce sont elles qui s’in­forment des besoins, qui éla­borent les solu­tions pra­tiques et qui contrôlent les réa­li­sa­tions. Elles sont sous le contrôle des conseils. Ain­si la com­mis­sion des finances est com­po­sée d’é­lus et de non-élus. (15)

Ces expé­riences ali­mentent les récits de poli­tique-fic­tion muni­ci­pa­liste tel que La Com­mune Libre de Saint-Mar­tin – Une expé­rience com­mu­nale du XXI ème siècle, de Jean-Fran­çois Aupetitgendre :

« [Q]uant aux conflits per­son­nels, ils étaient mis en exergue par la pra­tique démo­cra­tique. Dans les débats, il appa­rais­sait sou­vent que deux pro­po­si­tions anta­go­nistes n’avaient pour prin­ci­pal motif qu’une riva­li­té amou­reuse, une vieille dis­pute mal réso­lue, des jalou­sies diverses et variées, voire des dif­fi­cul­tés tout à fait intimes. Le besoin de pou­voir de celui qui se sent terne, la cri­tique per­ma­nente de celui qui ne croit plus en lui, la vio­lence de celui qui n’arrive pas à dire ce qu’il veut, le dépres­sif qui décou­ra­ge­rait un régi­ment d’entrepreneurs, le para­no qui sait bien que tout est fait pour lui nuire, le frus­tré qui ne jouit que de la frus­tra­tion de l’autre, le névro­sé qui regrette que deux et deux fassent quatre, le psy­cho­tique qui sait bien que deux et deux font cinq mais s’en fout, tous ces tra­vers bien
humains ren­daient la vie des comi­tés par­fois intenable».

« Chaque membre des conseils fut doté d’une série de car­tons de cou­leur lui per­met­tant d’exprimer sa posi­tion dans le débat. Le car­ton vert signi­fiait : Je me sens bien dans cette pro­po­si­tion, le car­ton bleu : Je n’ai pas d’opinion et je laisse faire les choses, le mar­ron : J’ai besoin de plus d’explication, le vio­let : Je suis réser­vé et pro­pose un amen­de­ment, le rouge : Je m’oppose à la pro­po­si­tion et veux en chan­ger. Au fur et à mesure des débats, la cou­leur domi­nante appa­rais­sait rapi­de­ment et aucune déci­sion ne pou­vait être prise avant que les cou­leurs vert et bleu ne se soient impo­sées, c’est-à-dire qu’un consen­sus géné­ral ne soit obtenu. 

De la même manière, l’usage d’un bâton de parole fut mis à l’honneur. Un bri­co­leur mar­ti­nois de génie mit au point un tube lumi­neux qui s’allumait au contact de la main et s’éteignait de lui-même au bout de cinq minutes. (…) Cette pra­tique évi­ta la mono­po­li­sa­tion des débats par les forts en gueule, obli­gea cha­cun à pré­pa­rer soi­gneu­se­ment ses inter­ven­tions et mit fin aux brou­ha­has insup­por­tables ». (16)

Pour finir, au niveau local, dans la pra­tique du muni­ci­pa­lisme liber­taire appa­raît l’écologie car, en pre­nant pos­ses­sion des entre­prises, les citoyen·ne·s ne peuvent mettre en péril leur propre envi­ron­ne­ment, leur air et leur eau sans en avoir conscience : les citoyen·ne·s plei­ne­ment impliqué·e·s et informé·e·s n’iront en aucun cas voter pour des pra­tiques qui condui­raient à la des­truc­tion de leur com­munes (sauf en cas de besoin vital).

Dans cette même logique, les délégué·e·s confédéraux·les sont envoyé·e·s par et pour don­ner l’avis des com­munes — sur les normes à éta­blir au niveau confé­dé­ral — au sujet de la pro­duc­tion, de la dis­tri­bu­tion ou du transport.

Tou­jours en dehors des ins­ti­tu­tions domi­nantes, les com­munes per­mettent de chan­ger radi­ca­le­ment les pra­tiques des entre­prises et leurs impacts sur l’environnement. La com­mune sait de quoi elle a besoin, elle demande ; elle sait com­ment et pour­quoi, elle dirige, coor­donne, délègue, révoque via les conseils citoyens.

Dans le pro­gramme élec­to­ral des verts de Burlington :

« Nous vou­lons créer une nou­velle poli­tique pour Bur­ling­ton, une poli­tique qui soit fon­dée sur l’écologie, le contrôle de la crois­sance, une éco­no­mie morale, la jus­tice sociale et une véri­table démo­cra­tie de la base. […]

Les verts de Bur­ling­ton veulent un mora­toire sur la crois­sance. Il est essen­tiel que les citoyens aient le temps de dis­cu­ter, dans des assem­blées publiques, le pro­blème qui se pose à bur­ling­ton et de déci­der démo­cra­ti­que­ment com­ment notre com­mu­nau­té peut se déve­lop­per selon des normes éco­lo­giques, huma­nistes et rationnelles. […]

Nous vou­lons que des efforts sérieux soient faits pour employer des sources d’énergie renou­ve­lables comme l’énergie solaire, éolienne et à base de méthane. Le recy­clage et la réduc­tion des déchets devraient être une prio­ri­té, tout comme la mise en place d’un pro­gramme régio­nal pour le par­tage de nos res­sources éner­gé­tiques avec les com­mu­nau­tés voi­sines.» (17)

« Les Bur­ling­ton Greens du Ver­mont ont uti­li­sé ce docu­ment comme pro­gramme élec­to­ral en mars 1989, quand ils ont pré­sen­té deux can­di­dats au conseil muni­ci­pal et un à la mai­rie, lors d’une cam­pagne muni­ci­pa­liste liber­taire. » (18)

Thi­baud Casas

Notes et références :

(1) : Poli­ti­kon : https://www.youtube.com/watch?v=lV4U5oY9XBc
(2) : https://vivelademocratieblog.files.wordpress.com/2016/05/le-municipalisme-libertaire.pdf
(3) : « […] C’est seule­ment l’ad­mi­nis­tra­tion de ces direc­tives poli­tiques qui peut être confiée à des conseils, des com­mis­sions ou des col­lec­tifs d’in­di­vi­dus qua­li­fiés, éven­tuel­le­ment élus, qui exé­cu­te­raient le man­dat popu­laire sous contrôle public et en ren­dant des comptes aux assem­blées qui prennent les déci­sions… » – Book­chin – Une socié­té à refaire, édi­tions Éco­so­cié­té, 1993, p. 255–256.
(4) : Les Ours de Berne et l’Ours des Saint-Pétersbourg
(5) : En nombre et en ressource
(6) : — John Clark dans « Intro­duc­tion à la phi­lo­so­phie éco­lo­gique et poli­tique de l’anarchisme ».
(7) : https://fr.wikipedia.org/wiki/Murray_Bookchin
(8) : https://www.monde-diplomatique.fr/2016/07/FERNANDEZ/55910
(9) : Poli­ti­kon : https://www.youtube.com/watch?v=lV4U5oY9XBc
(10) : https://www.economie.org/blog/janet-biehl-le-municipalisme-libertaire/ Cette source est uti­li­sée uni­que­ment car elle relate le livre de Janet Biehl
(11) : Le muni­ci­pa­lisme liber­taire, p. 130
(12) : https://populaction.com/murray-bookchin-municipalisme-libertaire-nouvelle-politique-communale/ : Eco­no­mie : Extraits de From Urba­ni­za­tion to Cities (Londres, Cas­sell, 1995). Tra­duit par Jean Vogel pour la revue Articulations.
(13) : John Clark dans Intro­duc­tion à la phi­lo­so­phie éco­lo­gique et poli­tique de l’anarchisme
(14) : Van­don­court : https://matricien.wordpress.com/politique/anarchisme/vandoncourt/
(15) : https://fr.wikipedia.org/wiki/Vandoncourt
(16) : https://populaction.com/la-commune-libre-de-saint-martin-une-experience-communale-du-xxieme-siecle-ou-comment-de-simples-citoyens-peuvent-ensemble-trouver-les-moyens-de-regler-les-problemes-du-travail-de-la-fermetur/
(17) : https://vivelademocratieblog.files.wordpress.com/2016/05/le-municipalisme-libertaire.pdf p. 198–200

Annexes  :

1. Le muni­ci­pa­lisme liber­taire de Janet Biehl :
https://vivelademocratieblog.files.wordpress.com/2016/05/le-municipalisme-libertaire.pdf

2. https://fr.wikipedia.org/wiki/Municipalisme_libertaire

3. https://fr.wikipedia.org/wiki/Murray_Bookchin

4. Intro­duc­tion à la phi­lo­so­phie éco­lo­gique et poli­tique de l’anarchisme de John Clark :
https://www.academia.edu/3188213/Introduction_à_la_Philosophie_Écologique_et_Polit que_de_LA narchisme_PDF_

5. Urba­ni­za­tion Without Cities: The Rise and Decline of Citi­zen­ship, Mur­ray. Book­chin :
https://libcom.org/library/urbanization-without-cities-rise-decline-citizenship

6. Social anar­chism or life­style anar­chism: an unbrid­geable chasm – M. Bookchin :
https://libcom.org/library/social-anarchism–lifestyle-anarchism-murray-bookchin

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