Le 8 mars approche et, comme vous le savez probablement, c’est la journée de la Femme. Cette journée est un bon prétexte pour proposer une critique de l’égalité homme-femme et la façon dont les politiques s’emparent du sujet.
Mesdames, avez-vous décidé ce que vous allez acheter ? Messieurs, savez-vous quoi offrir? Vous avez l’embarras du choix, car pour cette occasion des milliers de promotions s’offrent à vous ! De la lingerie ? Du maquillage ? Une carte bancaire rose à fleurs ? Non, restons sérieux.
Le 8 mars, ce n’est pas la journée de « la Femme » (quoi que cela puisse être), mais la journée internationale des droits des femmes et de l’égalité hommes-femmes. Ce n’est donc pas un jour dédié au marketing genré et à l’exaltation de la féminité à coup de publicités fuschia (pour information, l’offre promotionnelle concernant la carte bancaire n’est pas une invention, elle a réellement été mise en place par une grande banque française…).
Parlons donc de choses sérieuses. Peut-être avez-vous vu fleurir sur les murs de Lyon les affiches représentant le thème choisi par la ville cette année pour le 8 mars, les femmes remarquables. La résistante Lucie Aubrac, la scientifique Marie Curie et la philosophe Simone de Beauvoir sont mises à l’honneur, la mairie de Lyon faisant ainsi preuve d’une originalité évoquant celle d’un roman Harlequin. Ne soyons pas mauvaises langues, l’intention est bonne ; par ailleurs, de nombreux ateliers, débats et expositions sur ce même thème, organisés ou relayés par la ville de Lyon, auront lieu durant cette journée et pendant la semaine qui suivra.
Cependant, les actions officielles ne sont pas les seules à être mises en place, puisqu’un appel à la grève des femmes a été lancé, partout en France, pour protester non seulement contre les différences de salaire mais aussi contre les manifestions ordinaires du sexisme au quotidien et le partage toujours inégal des tâches domestiques, avec des rassemblements prévus le 8 mars à l’heure symbolique de 15h40 — heure à laquelle, du fait des inégalités salariales, les femmes commencent à travailler gratuitement dans une journée standard (9h – 12h30/13h30 – 17h).
Quoi de neuf à la campagne ?
En attendant cette journée du 8 mars, la campagne présidentielle continue. Une petite mise à jour s’impose donc pour savoir ce qui s’est récemment dit et fait sur le sujet des droits des femmes.
Par exemple, Marine Le Pen, ayant refusé de se voiler devant le grand mufti du Liban (la plus haute autorité sunnite du pays), aurait ainsi envoyé « un magnifique message de liberté et d’émancipation […] aux femmes de France et du monde » selon le vice-président du Front National Florian Philippot. Outre l’effet de communication qui paraît évident — le sujet a bien fait parler d’elle — on est en droit de se demander quel message d’émancipation peut envoyer une femme qui veut en empêcher d’autres de porter ce qu’elles veulent, qui ne recadre pas les députés de son camp aux propos sexistes, et dit ne pas savoir ce que recouvre le féminisme. Une militante féministe ayant souhaité l’interpeller lors du salon de l’Agriculture a par ailleurs été violemment repoussée par son service d’ordre.
Emmanuel Macron, quant à lui, s’est fait taper sur les doigts pour avoir affirmé que les opposants à la loi Mariage pour Tous avaient été « humiliés » et insuffisamment écoutés. Inutile de préciser que compatir avec ceux qui, il y a quelques années, déversaient massivement leur sexisme et leur homophobie dans les rues n’est pas réellement un signe de bonnes intentions envers les femmes et les personnes non hétérosexuelles et/ou cisgenres, et impossible de ne pas voir une volonté du candidat d’attirer les électeurs militants ou du moins favorables Manif’ pour Tous — peut-être ceux qui, déçus, quittent le navire Fillon. Cependant, il se dit favorable à la procréation médicalement assistée pour les femmes seules et homosexuelles. Lors de la présentation de son programme le 2 mars dernier, il a également soumis l’idée de faire de l’égalité hommes-femmes une « cause nationale » en rappelant la sous-représentation, les violences et le harcèlement dont sont victimes les femmes. Il utilise d’ailleurs les mots « consentement tacite » pour parler de certains aspects du sexisme : un terme d’apparence assez vague, mais qui peut évoquer la misogynie internalisée au point qu’elle apparaît comme la norme, ou bien encore la culture du viol.
Enfin, en prévision du 8 mars, notons brièvement que le Parti de Gauche sous la houlette de Jean-Luc Mélenchon, ainsi que le Nouveau Parti Anticapitaliste qui sera représenté en avril par Philippe Poutou, ont au niveau local signé l’appel à la grève des femmes évoquée plus haut et seront par conséquent présents au rassemblement lyonnais.
La suite au prochain épisode ?
Bien entendu, on peut supposer que le 8 mars sera une occasion pour tou.te.s les candidat.e.s de clarifier ou d’ajouter certains points à leur programme en ce qui concerne l’égalité hommes-femmes, mais aussi de tenter de nous expliquer pourquoi leur programme économique, social, voire écologique (pourquoi pas ?) s’inscrit dans une démarche pour les droits des femmes.
Mercredi prochain, ne nous fatiguons donc pas avec des fleurs et du parfum ; informons-nous plutôt sur ce qu’il reste à faire évoluer en matière d’égalité hommes-femmes, et restons à l’écoute des positions sur ce sujet de celles et ceux qui souhaitent diriger le pays.