Rénovation du modèle social : combat et enjeu démocratique

La com­mu­ni­ca­tion offi­cielle de l’INSA

Pour faire suite à un constat de l’Institut Gas­ton Ber­ger qui observe une uni­for­mi­sa­tion de l’origine social des étu­diants du cam­pus, l’INSA sou­haite réno­ver son modèle social avec trois leviers de finan­ce­ment : faire du lob­bying auprès des pou­voirs publics pour le sou­tien d’un modèle éco­no­mique réno­vé et inclu­sif, un mécé­nat de soli­da­ri­té inter­gé­né­ra­tion­nelle et, la fameuse, une aug­men­ta­tion glo­bale des frais de sco­la­ri­té par un sys­tème éche­lon­né en fonc­tion du foyer fis­cal de l’étudiant.

Des constats qui laissent perplexe

L’enjeu de la réno­va­tion du modèle social est fon­da­men­tal pour l’INSA étant don­né la voca­tion de notre école à don­ner à toute per­sonne qui en a le poten­tiel la chance de pou­voir accé­der au métier d’ingénieur. Cepen­dant, au regard des der­nières années et de ce qui se passe dans d’autres écoles, il appa­raît clai­re­ment que l’augmentation des frais de sco­la­ri­té est une poli­tique natio­nale qui annonce un désen­ga­ge­ment tou­jours plus impor­tant de l’état dans le domaine de l’enseignement supé­rieur. Der­rière cette réforme, ce sont fina­le­ment les fon­de­ments de l’enseignement public qui sont remis en cause. De plus, si l’action est néces­saire pour ten­ter d’établir une meilleure poli­tique, les solu­tions envi­sa­gées sont très contes­tables et contes­tées : les causes sont évi­dem­ment pro­fondes, natio­nales et touchent d’abord l’enseignement secon­daire et un évin­ce­ment de la repré­sen­ta­tion des classes moyennes à l’INSA est redou­té par cer­tains. Fina­le­ment, un sen­ti­ment lar­ge­ment par­ta­gé est que la réno­va­tion du modèle social appa­raît être uti­li­sé comme un pré­texte pour faire ava­ler la pilule d’une aug­men­ta­tion des frais qui s’avère être une volon­té poli­tique bien anté­rieure aux constats de l’Institut Gas­ton Ber­ger. De fait, les res­sorts sont com­plexes et nous sommes loin d’avoir toutes les cartes en main.

Un enjeu démo­cra­tique fort

Nous sommes fina­le­ment face à un réel enjeu démo­cra­tique. En effet, alors que les direc­tives viennent de tout en haut, les citoyens peuvent avoir du mal à s’opposer dès lors que le flou règne, que les direc­teurs se déres­pon­sa­bi­lisent sur le dos du groupe INSA qui est une simple asso­cia­tion, que les délais sont très ser­rés, que la coor­di­na­tion entre les INSA n’est pas bonne, que des dis­cus­sions sont trop pri­vées, que des débats sont sans cesse repous­sés et fer­més. Ne soyons pas aveugles sur le fait que dans de telles cir­cons­tances, l’avenir que l’on nous pré­pare semble exclure beau­coup de voix et ne per­met pas le bon exer­cice démo­cra­tique. Il n’est un secret pour per­sonne que la situa­tion de l’enseignement supé­rieur en France est aujourd’hui de plus en plus pré­caire. Bien que cer­tains luttent, les forces ne convergent pas encore. Dès lors, c’est à nous, étu­diants, ensei­gnants, per­son­nels admi­nis­tra­tifs de nous mobi­li­ser pour des convic­tions par­ta­gées qui sau­ront affer­mir le rayon­ne­ment authen­tique de l’INSA, de son per­son­nel et sur­tout de ses étu­diants pour l’avenir de ce monde.

Un moment déci­sif pour l’avenir de l’INSA et de l’enseignement public

Indé­nia­ble­ment, l’issue de cette mesure sera déci­sive pour l’avenir de l’INSA. Peut-être est-ce le moment de se sou­ve­nir de Gas­ton Ber­ger qui a fon­dé l’INSA en rup­ture dans une volon­té de réfor­mer la socié­té, alors que le monde moderne est en crise scien­ti­fique, tech­nique, morale, spi­ri­tuelle. Qui nie­rait aujourd’hui que notre monde est tou­jours en crise ? Si ce mot à une forte conno­ta­tion néga­tive, son sens s’associe ori­gi­nel­le­ment à celui de juge­ment et de déci­sion. Nous avons ensemble à faire entendre une (ou plu­sieurs !) voix. L’INSA, par ses ambi­tions et pour ce qu’il repré­sente encore doit res­ter une ins­tance qui affirme à temps et à contre-temps un modèle ori­gi­nal, éga­li­taire et par­fois réso­lu­ment dans la rup­ture pour impul­ser la conver­sion socié­tale. Pour­tant, l’INSA semble plu­tôt s’inscrire dans une dyna­mique qui suit les modèles voi­sins (avec cepen­dant d’autres rai­sons affi­chées) sur le sujet de l’augmentation des frais de sco­la­ri­té dans l’enseignement supé­rieur. Ne pour­rions pour­tant nous pas faire preuve d’un plus grand cou­rage politique ?

Un grand pou­voir implique une grande responsabilité

Le calen­drier est tel que les par­tiels sont à l’ordre du jour pour les étu­diants et cela s’enchaînera avec les grandes vacances. Les votes auront pour­tant lieu dès octobre 2021 et nos direc­teurs dans leur dia­logue avec le minis­tère poussent for­te­ment pour l’adoption de ces mesures : selon eux, se don­ner les moyens d’agir est une néces­si­té. Cepen­dant, il est de notre res­pon­sa­bi­li­té de ne pas lais­ser ces déci­sions impor­tantes se jouer dans un silence sté­rile. Car vivre en démo­cra­tie ne signi­fie pas agir doci­le­ment sous la pres­sion de l’état mais plu­tôt se battre au quo­ti­dien pour ins­tau­rer un véri­table dia­logue et prendre ensemble des déci­sions éclai­rées. C’est pour­quoi, nous pro­po­sons que toute la com­mu­nau­té des INSA se mobi­lise en sep­tembre dans la volon­té de lut­ter contre un ave­nir qui s’impose de lui-même, pour un enga­ge­ment plus fort de l’état dans l’enseignement supé­rieur et pour une plus grande trans­pa­rence de nos diri­geants car nous ne pou­vons accep­ter qu’une telle mesure passe sous le pré­texte de la réno­va­tion d’un modèle social. D’ailleurs, il y a des gens qui élèvent déjà leurs voix !

Débuts de mobilisation

Il y a bien sûr les élus étu­diants qui font un très bon tra­vail de com­mu­ni­ca­tion et d’explication. Mais en posi­tion d’opposition déjà assez franche, on peut citer le col­lec­tif très actif en cette période, dont le nom fait sou­rire « Insa­Vous­Fait­Les­Poches » qui orga­nise la résis­tance à tra­vers plu­sieurs leviers : celui de l’interpellation des étu­diants et per­son­nels à tra­vers plu­sieurs affiches sur le cam­pus ; de l’appréhension des cou­lisses de la réforme, à tra­vers notam­ment une assem­blée géné­rale le 20 mai ayant réuni envi­ron 80 per­sonnes, per­son­nels et étu­diants qui se posaient de réelles ques­tions, spé­cu­laient sur l’origine (intrin­sèque ou extrin­sèque à l’INSA ?), rap­pe­laient les bien­faits de l’égalitarisme répu­bli­cain, poin­taient les insuf­fi­sances démo­cra­tiques citées ci-avant, en pré­sence notam­ment de syn­di­ca­listes, d’élus d’autres INSA, de gens d’autres écoles d’ingénieurs ayant subi chez eux cette fameuse « hausse ». Enfin, bien sûr, le levier à pro­pre­ment dit de la résis­tance, par le lan­ce­ment d’une péti­tion (lien ci-des­sous), la volon­té d’interpeller les médias (régio­naux voire natio­naux), de sus­ci­ter le posi­tion­ne­ment d’hommes poli­tiques en ins­cri­vant le cas de l’INSA dans un contexte glo­bal : celui de la pri­va­ti­sa­tion pro­gres­sive et peut-être irré­ver­sible de l’enseignement supé­rieur. Il y a donc de la volon­té, une réelle mobi­li­sa­tion, et une envie mar­quée d’imposer le sujet dans le débat public à la ren­trée 2021.

Est-il pos­sible d’envisager l’avenir si nous sommes divi­sés et sans projet ? 

Notre direc­teur, par ses dis­cours et sa manière de s’exprimer semble vou­loir ména­ger tout le monde et être très sen­sible à la ques­tion de l’unité. Il est cer­tain que l’INSA n’ira pas bien loin sans l’engagement et le sou­tien de la force motrice prin­ci­pale : les étu­diants. Alors que cette déci­sion néces­site d’être mûre­ment réflé­chie et cela indé­pen­dam­ment de la volon­té de réno­ver un modèle social, celle-ci se voit pré­ci­pi­tée par un calen­drier et un rap­pel que des élec­tions pré­si­den­tielles auront lieu en 2022. Balayant toute oppo­si­tion en disant qu’il y a une urgence d’agir, aucun dia­logue de fond sur la ques­tion du modèle poli­tique sous-enten­du par une réforme d’augmentation des frais de sco­la­ri­té n’a été à ce jour ini­tié entre les étu­diants et la direc­tion. Dans un tel contexte, les ten­sions et oppo­si­tions ne peuvent qu’augmenter ! Alors qu’il y a là un réel enjeux démo­cra­tique et de remise en ques­tion des fon­de­ments de l’enseignement public, il semble légi­time de se deman­der pour­quoi la réflexion de toute la com­mu­nau­té INSA n’a‑t-elle pas été sol­li­ci­tée sur cette ques­tion comme cela a été le cas pour les actions sociales à mener ? Il appa­raît que nous avons besoin d’une ligne poli­tique de fond, un pro­jet qui nous emmène dans une direc­tion claire, tout comme Gas­ton Ber­ger avait une pen­sée et un pro­jet pour l’INSA. Autre­ment, com­ment pou­vons-nous bâtir ensemble des réformes et actions cohé­rentes pour trans­for­mer le modèle social et plus géné­ra­le­ment le monde dans lequel nous vivons ? Si nous ne pou­vons pas nous réunir autour d’une table pour en dis­cu­ter hori­zon­ta­le­ment, sans doute devrons nous nous unir dans le com­bat en par­ti­ci­pant à l’écriture d’une page de l’histoire de l’INSA.

Ayman LAHBABI & Fran­çois VANDERMERSCH

Lien vers la péti­tion : http://chng.it/LTZt5gPzPm

Tri­bune sur l’in­sa­tiable https://insatiable.info/2021/05/04/la-reforme-du-modele-social-de-linsa-nest-quun-pretexte-a-laugmentation-des-frais-de-scolarite/

 

Tri­bune sur le blog de Média­part :  https://blogs.mediapart.fr/josepha-onno/blog/170521/l‑insa-se-prepare-augmenter-ses-frais-de-scolarite-pour-renover-son-modele-social

Lien vers le dis­cord INSA­Vous­fait­Les­Poches : https://discord.gg/XnHynzjknJ

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